Platon, voyait autrui comme une subjectivité. L’autre est fonction ou produit de mon regard, de mes filtres de la réalité qui m’anime et qui me permet de le voir tel que je veux qu’il soit. Derrière cette introduction aux allures opaques, se profile des éléments l’essentiel qui sous-tendent la relation avec autrui.
Serions-nous les architectes des sentiments que nous suscitons chez l’autre à notre égard? Serions-nous les faà§onneurs d’une part des sentiments de l’autre, qui feront qu’il nous verra d’une certaine faà§on ? Comme, nous le disions dans un précédent article : «Autrui m‘interpelle si je désire m‘en approcher, c‘est parce qu‘à? son contact, je me révèle à moi-même»
Cela dénote clairement d’une interaction elle-même à la base de toute transaction relationnelle, c’est à partir du principe identique que l’état émotionnel de l’un impactera sur celui de l’autre. Ne nous est-il jamais arrivé de constater qu’après un échange de quelques secondes avec une personne, notre état émotionnel en soit sorti transformé au point de nous sentir enthousiaste, euphorique ou à contrario démotivé, morose ? Soit ! Dans toute relation existe un émetteur et un récepteur d’émotion, ceux-ci peuvent permuter au fur et à mesure de l’évolution de la conversation.
Dans un groupe de personnes, que ce soit dans une sphère professionnelle une entreprise, une salle de classe par exemple, ou un couple l’individu qui parvient à sensibiliser le ou les autres, est celui dont l’émotion est la plus expressive, c’est-à -dire que plus l’intensité de l’émotion est importante plus elle parvient à atteindre le ou les autres, qui l’exprimeront à leur tour. C’est un peu comme si l’émotion était dotée d’un effet contagieux. Cela se vérifie également au sein d’un couple.
Quels que soient les groupes d’individus, il existe toujours parmi eux, celui dont l’influence sort du lot, de sorte que les regards seront tournés vers lui comme pour dire que c’est à lui que revient le mot de la fin. Il en est de même dans les organisations, le leader est celui qui influence. Pour boucler avec ce que nous disions plus en amont, s’il est de bonne humeur, de fortes probabilités subsistent pour que l’ambiance au sein de ce groupe soit positive ou inversement et la performance au sein de ce groupe en sera la première bénéficiaire et à l’inverse elle sera moindre. Le €˜la’ donné par le chef a toute son importance au sein de la mobilisation des équipes ou des personnes du groupe
La transmission de l’émotion s’observe remarquablement dans des sphères à l’intérieur desquelles les personnes viennent se divertir. L’émotion peut être paroxystique tel que cela se produit lors d’événements sportifs, comme un match de foot ou une représentation théà¢trale, ou encore un concert musical. La foule entière éprouve une émotion intense et synchronisée, notamment lorsqu’elle se lève de son siège pour acclamer de joie l’équipe venant de marquer un but.
Notre cerveau social y ait pour beaucoup dans cette contagion émotionnelle. Parler de «€‰cerveau social€‰» implique que nous sommes une espèce, dotée de compétences spécifiques pour vivre en société. La vie en société suppose aussi l’existence de comportements et émotions particuliers €“€¯attachement, amour, empathie. Sans cet équipement émotionnel de base, la vie sociale se révélerait impossible. Ces émotions sociales nous poussent à rechercher la compagnie d’autrui et engendre dans certains moments précis une émotion synchronistique c’est-à -dire ressentie par deux ou davantage de sujets au même instant.
Une étude permettant de mettre en évidence l’interaction émotionnelle et physiologique a été réalisée auprès de patients se faisant traiter. Ceux qui parmi eux avaient eu un médecin ayant manqué d’empathie, avaient un état un physiologique en désynchronisation avec lui. En revanche, ceux qui s’étaient sentis bien au cours de la consultation et avaient l’impression d’être tombés sur le bon médecin, ont eu un état physiologique ayant évolué parallèlement avec lui, c’est un peu comme si patients et médecins avaient été synchronisés sur le même pas de danse. La réussite d’un processus thérapeutique quel qu’il soit, nécessite une synchronisation de la chimie inter- relationnelle.
Cette synchronisation des états physiologique, appelle trois modalités : La première, une attention complète et centrée sur la personne avec laquelle s’installe une communication. La seconde est fondée sur une communication non verbale. En d’autres termes, lorsque deux personnes sont en phase c’est comme si un courant circulait parfaitement dans les deux sens de la flèche, leurs postures sont synchronisées un peu comme celles de deux danseurs en action. La troisième, un sentiment positif doit émaner de cette relation interpersonnelle, qu’importe l’activité qui est réalisée, l’important est de se retrouver avec, c’est un moment singulier ou s’opère une chimie.
Les relations interpersonnelles intenses n’obéissent ni aux lois du hasard, ni à celles du destin, ou d’une quelconque volonté d’un de ces dieux de la cité, elles se construisent graduellement et transitent préalablement par une écoute empathique et profonde du sujet. Cela est vrai dans le domaine privé, avec sa famille et ses amis, dans un processus thérapeutique mais cela l’est tout autant dans le domaine professionnel. Un leader est avant tout celui qui sait écouter avec empathie c’est-à -dire comprendre le message de l’autre sans nécessairement les partager. Il peut en effet, partager les émotions de l’autre et dans ce cas, nous parlerons de sympathie et il n’y a rien de mal à cela y compris dans l’univers professionnel. Nous comprenons aujourd’hui le pouvoir des émotions car elles incarnent un puissant moteur d’action pour mettre en place des processus de pensées. Nous partageons les émotions pour commencer à penser ensemble et à symboliser. Autrement dit, se réjouir de ce qui réjouit l’autre et s’attrister de ce qui attriste l’autre c’est précisément ce qui contribuent à nourrir la chimie des relations interpersonnelles.