L’hyperprotection du parent vis-à -vis de l’enfant, découle le plus fréquemment de ses propres angoisses face à la vie et son incapacité à les réguler. Le parent apeuré et en carence émotionnelle, refuse de voir son enfant s’inscrire dans l’accomplissement d’un effort pour se sortir d’une situation quelle qu’elle soit, ce peut être même dans le cadre d’un jeu. Il associe cela à une souffrance face à laquelle il se projette et qui rappelle les siennes et ne peut supporter que sa progéniture y soit confrontée. Il surinvestit l’enfant, soit en l’empêchant de faire les choses par l’énonciation d’un interdit, soit en les faisant à sa place : €˜’Attends, Papa ou Maman va venir le faire, tu n’y arriveras jamais ». La compassion est en l’occurrence mutilante avec des répercussions dans le futur qui aboutirait à une incapacité de se prendre en charge, de se sécuriser, d’accomplir les tà¢ches importantes sa vie, de prendre soin de soi. Cela n’empêchera pas le parent de harceler son enfant pour qu’il fasse les choses par lui-même, mais induira par la même occasion un comportement ambivalent, transmettant une chose et son contraire : €˜’tu dois impérativement, prendre ta carte de bus », le lendemain le parent remets la carte à l’enfant : » tiens je t’ai pris ta carte de bus,’..Qu’est ce que tu ferais pas sans moi ? ». A ce tarif là , rien en effet ! L’attitude schizophrénique devient le naturel du parent nourricier qui transite le plus souvent par des injonctions prononcées à l’enfant tout en laissant y contrevenir. En effet, le parent scelle son indispensabilité, il est et souhaite rester l’incontournable pivot par lequel se font les choses et en l’absence duquel elles ne se feront pas. Par son avidité à la reconnaissance conjuguée à ses angoisses existentielles, il manifeste un volontarisme exacerbé face l’accomplissement de la moindre tà¢che incombant à l’enfant, c’est ainsi qu’il creuse le sillon de l’inaptitude par lequel ce denier cheminera la vie durant, s’il ne réalise pas la nécessité de s’en affranchir.
Il pousse à l’autonomie tout en la sabrant par des propos mutilant, rompe avec lui tout en s’ingérant dans sa vie quitte à faire les choses à sa place. Le parent anxieux se montrera parfois insultant et condescendant vis-à-vis de l’enfant dénonçant son incapacité qu’il assimilera à de la paresse, se verra à son tour victime de ses propres jurons si l’enfant développe un comportement agressif.
La personnalité a toutes les chances de développer un trouble, c’est-à -dire d’être freinée dans son éclosion avec une mécanique qui déraille parfois, à cause d’un parent castrateur qui n’a eu de cesse, d’annihiler l’imagination créatrice de l’enfant et de sabrer sa puissance d’agir. L’enfant se sent amputé et demeure dans l’obligation d’user du parent comme d’une béquille. Apprendre à nager à l’enfant, c’est lui enseigner le mouvement dans un environnement différent de ce qu’il est lui est le plus familier. C’est lui transmettre des stratégies d’adaptions qui lui permettent de se maintenir d’avancer tout en prenant du plaisir, alors que les lois physiques rompent avec celle du milieu dans lequel il évolue habituellement. Puisqu’enseigner, c’est transmettre, c’est qu’il existe un instructeur qui énonce comment faire et un élève pour accomplir selon le modèle dicté. L’instructeur ou l’enseignant ou encore le parent éducateur, ne feront jamais à la place de l’apprentis, ou de l’enfant, ils ne servent que de guides pour que ce dernier parvienne une réalisation autonome. Cela suppose de la part des passeurs une retenue et non une projection d’eux-mêmes sur celui qui est acquérir les habiletés. Qu’est ce que l’autonomie, si ce n’est le fait de s’administrer soi-même, la faculté de se déterminer par soi-même, de choisir, d’agir librement. Or la faculté s’acquiert et se développe avec le temps, c’est le propre même de cette autonomie vis-à -vis de laquelle tout parent aspire pour son enfant. Lorsque le parent se représente la vie comme une mer agitée, produisant parfois des vagues qui aspirent les nageurs dans ses rouleaux, il ne peut alors que communiquer sa vision du réel ponctué de croyances les plus déroutantes, face à laquelle l’enfant aura la plus grande difficulté à s’affranchir.
Sécuriser l’enfant est prépondérant, vital et nécessaire à son développement. L’hypersécuriser, c’est atrophier son développement psychique, c’est lui transmettre que la vie et les individus qui la vivent sont une menace permanente, c’est le rendre vulnérable et orchestrer son chaos.