Nos ancrages, nos inhibitions, nos ankyloses comportementales, neuronales, s’enracinent dans notre histoire personnelle. Celle-ci se construit à partir de nos expériences de vies en interactions avec un panel d’acteurs environnementaux, tels que nos parents, nos amis, nos éducateurs, nos guides, nos soignants, nos politiques, nos représentants religieux… Certains d’entre eux se montreront stimulants à notre égard de façon directe ou indirecte, d’autres lénifiants, d’autres aveulissants, décourageants, intimidants, apeurants.
Les déterminismes sont souvent le fruit d’une rencontre entre deux figures. L’un prêchera la parole que l’autre ancrera dans sa mémoire et qui germera jusqu’à produire des décisions se traduisant en acte. Elle l’accompagnera durant de longues périodes. Celle-ci animera l’étincelle conduisant l’autre vers un épanouissement, vers un développement de lui-même. Parfois, une parole peut au contraire, figer l’individu dans sa réflexion, dans son action, engendrant des peurs multiples, qu’il traînera sa vie durant, perdant de vue l’effet aux multiples ramifications de cette parole mutilante. Lorsque le langage compassionnel, pratiqué au nom de l’altruisme, à l’instar d’un emballage cadeau, revêt à l’intérieur de lui des subtilités paralysantes, décourageantes, intimidantes, son effet s’avère dévastateur au long cours à commencer par un délitement de l’estime de soi c’est-à-dire une piètre évaluation de soi. Un enchaînement d’effets qui se prolonge en se ramifiant jusqu’aux phobies.
Nous avons tous été ciblés par les propos d’un parent, d’un ami, d’un passant, qui au nom du ‘’bien’’ qu’il veut inoculer, nous invite à la prudence, au changement de cap voire au renoncement,. Ce soit disant bien, qui n’est autre que l’expression de sa propre carte mentale et non du territoire, qui n’est autre que sa perception de la réalité parfois accidentée et non de la réalité, qui n’est autre que sa représentation du bien et du mal, et non l’Utile et du Nuisible, qui ignore souvent tout de l’autre mais qui se projette à travers lui voulant parfois lui vivre sa propre vie par procuration. L’ineptie de certaines personnes poussera le bouchon jusqu’à affirmer sans vergogne : » je ne crois que ce que je vois et je te conseille de… ». Dans cette affirmation, le locuteur postule pour une vison triomphante, la sienne, sur celle de tous les autres. Un doute éclipsé par une croyance aveugle en son propre entendement. L’entendement se réforme, sauf ces personnes ne l’entendent que autrui et non pour elles.
Fort heureusement, il existe également des propos lénifiants et galvanisants, qui trouvent leur existence et leurs effets, même au-delà du cercle thérapeutique. Ceux-ci en germant conduisent vers une construction de soi.
Réparer l’estime de soi, suppose de déconstruire la pensée oblique, c’est à dire d’œuvrer sur les distorsions cognitives. Chacune d’elles raconte sa propre histoire, évoque ses racines et fournit après un long travail, ce qui parmi les facteurs comportementaux et environnementaux, auraient pu conformer une pensée oblique. C’est une forme d’idée-genèse de la distorsion cognitive.
Certaines personnes ayant du mal à réaliser un objectif, quel qu’en soit sa taille, penseront qu’elles n’y parviendront jamais : »je suis nul, je n’y arriverai jamais ». La distorsion consiste notamment ici, en une sur-généralisation de son incapacité. De par la peur qu’elle éprouve à l’idée de ne pas y arriver, elle porte atteinte à un certains nombre de ses capacités cognitives, qui entravent tout processus de performance. C’est une idée qui l’assiège, c’est le principe de l’obsession, c’est aussi son étymologie. Or celui qui est assiégée n’est plus chez lui. En l’occurrence, l’individu est envahi par l’émotion de la peur, il n’est plus lui même.
Rappelons que les stress itératifs, finissent par atrophier le volume de l’hippocampe entravant le bon fonctionnement du processus décisionnel élaboré par le cortex pré-frontal. Grâce à la plasticité cérébrale en tant que mécanique, nous pouvons par des apprentissages nouveaux et répétés, diminuer voire éradiquer certaines distorsions, par une déconstruction suivie de l’acquisition de schémas mentaux alternatifs. Les thérapies cognitivo- comportementales aidant beaucoup à cela. Comme tout apprentissage, il suppose une mobilisation et une répétition. Ce sont les conditions requises par la plasticité. L’apprentissage nous affranchit, à condition d’y consentir.