Le visage du pervers et la loi .

Se détourner de la loi pour mieux en suivre d’autres, qui sont les siennes, telle est la devise du pervers.  Pour autant, est-on pervers pour avoir stationné sur un trottoir rouge et blanc ou avoir prétexté une panne de voiture pour ne pas se rendre dans une réunion, ou encore pour avoir affirmé que 2 et 3 font 7 ? Par ailleurs, si toute transgression de la loi est perversion, cela signifie que toute révolution est d’ordre pervers et par conséquent, il n’y aurait sans doute aucune évolution impossible dans ce monde. Quelles sont donc ces lois que le pervers prend plaisir à transgresser ? Ou encore, quelles catégories de lois font que leurs transgressions conduisent l’insoumis à mériter le qualificatif de pervers ? Enfin, y a-t-il des lois que le pervers prend pour ces désirs et quelles sont-elles ?

 

L’individu baigne dans un univers de lois dont il faudrait en distinguer les catégories. Il existe des lois naturelles, c’est-à-dire auxquelles nous n’échappons pas, du style :  »le fait de manger pour vivre » ou encore  »tout le monde finit par mourir », puis des lois symboliques, telles que les lois mathématiques, arbitraires d’une certaine façon pour ce qui est de la commutativité des symboles. Enfin des lois flicardes pour maintenir un certain état de la société, comme le fait de payer des impôts, ou encore de l’obligation d’observer un jour férié dans la semaine…

 

La perversion n’est pas la transgression de la loi par définition, mais de certains types de lois. Cela implique qu’elle soit dépositaire d’une spécificité. Quelle est-elle ? La perversion est une transgression d’une loi humaine ordinaire, c’est-à-dire d’une loi mettant en rapport deux individus, dont la caractéristique est de faire abstraction de l’autre. Autrement dit, la perversion n’est autre, que le déni de l’altérité, c’est-à-dire la forclusion de la liberté de l’autre.

 

De quelle liberté est-il question ? De celle qui part de l’un pour arriver jusqu’à l’autre. L’écart entre la liberté personnelle et celle de l’autre fait que celle-ci se doit d’être limitée à partir du moment ou l’autre n’est pas ou n’est plus consentant pour partager une expérience proposée. Or ce qui fait la caractéristique de la perversion c’est ce rapport à l’autre qui bafoue cette liberté. Le pervers, n’est pas celui qui refuse la loi, en général la loi s’applique à l’autre, quant à lui, il s’en fait une sur-mesure. Le pervers connait le décalogue et qu’il se plait à faire appliquer à l’autre, mais lui ne connait que de bonnes raisons de ne s’en sentir concerné, celles qui obéissent à son désir.

 

Un désir non déformé, apparaissant tel quel dans la conscience et ne se souciant guère de l’autre, ni de lui-même.

 

Prenons le cas de l’interdiction de l’inceste qui vise à protéger le narcissisme de l’enfant.

Le pervers va être celui qui va se détourner de cette loi pour outrepasser la limitation imposée par l’autre, en obéissant à son désir pour le désir, il se montrera aveugle face  aux sévices infligés à l’autre.  Le visage du pervers est bien celui de trouver du plaisir dans les maux d’autrui.

 

Le pervers renvoie-t-il  à une pathologie ou est-ce à un comportement qui contiendrait plusieurs degrés ?

 

Un comportement pervers est une aptitude chez tout un chacun, dans le quotidien de l’existence. Ces comportements n’ont pas lieu d’apparaitre, sauf dans des périodes d’angoisse, de crises, ou de bouleversements personnels. Comme Il n’existe pas de frontière au sens de rupture ou de discontinuité entre le normal et le pathologique, par conséquent une personne ayant de temps à autre un comportement pervers, n’est pas pour autant le pervers au sens clinique du terme.

 

Et pourtant la perversion constitue le résultat d’une difficulté à assembler différentes pulsions, ce qui signifie que nous sommes tous enclins à une certaine perversité. La manière dont les échanges sociaux sont configurés et articulés peut favoriser des comportements heureux ou malheureux, c’est-à-dire à engendrer à un instant donné des conduites perverses.

 

Le fantasme pervers ne conduit pas à qualifier une personne de perverse, sans quoi Agatha Christie ou nombre de romanciers le seraient tout autant. Ce qui qualifie le pervers ce sont ses conduites, ses agissements, ses passages à l’acte.

 

La Médicalisation au 19 ième siècle a introduit un changement dans le sens du mot perversion  qui jusqu’à présent signifiait tirer vers le mal, renverser.

En 1886, Richard von Krafft-Ebing, professeur de psychiatrie, publie l’ouvrage qui fera de lui le véritable pionnier de la sexologie : Psychopathia Sexualis. Dès la préface, il souligne « l’influence puissante qu’exerce la vie sexuelle sur l’existence individuelle et sociale dans les sphères du sentiment, de la pensée et de l’action ». Un discours aussi clairement axé sur les effets de la sexualité, voilà qui est nouveau pour l’époque et explique que ce livre fut un vrai succès, dépassant largement les milieux médicaux. A partir de quarante-cinq observations cliniques, dont onze de ses propres patients, R. von Krafft-Ebing propose un exposé de « la pathologie sexuelle générale », à laquelle s’ajoutent les anomalies sexuelles non-classées. Il crée les termes de sadisme et de masochisme, le premier en référence au marquis de Sade pour évoquer la jouissance retirée des souffrances infligées au partenaire, le second à Léopold Sacher-Masoch, l’auteur du roman La Vénus en fourrure (1901), dont le héros est assoiffé d’humiliations de la part de la femme qu’il aime.

La médicalisation de la perversion faisant que le sens de la perversion fut étendue à des pratiques sexuelles déviantes. Or selon la mentalité de l’époque, la  physiologie du rapport sexuel, consistait en la pénétration de l’orifice vaginale par l’organe mal et tout ce qui pouvait être autre était réputé comme déviant, comme notamment la pratique homosexuel. R. Krafft-Ebing a proposé au fil des éditions différentes classifications des anomalies sexuelles. La version initiale comportait quatre classes : l’absence de pulsion sexuelle ; le renforcement pathologique de la pulsion sexuelle ; une date d’apparition trop précoce ou trop tardive de la pulsion ; et les perversions, au nombre de trois (sadisme, nécrophilie et « sentiment sexuel inversé » – lire homosexualité) ; la dernière édition ne retient que deux groupes principaux : les anomalies selon la fin (sadisme, masochisme, fétichisme et exhibitionnisme) et selon l’objet (homosexualité, pédophilie, zoophilie, gérontophilie et autoérotisme).

 

 

Une conduite perverse se  trouverait dans une relation d’objet partiel qui se trouve maintenu dans une forme désir idéalisé, qui ne parviendrait pas à aboutir à une forme d’amour, comme si le désir pervers était celui qui se portait sur un objet un détail et non pas sur l’autre en tant qu’individu.

Freud parle de la perversion polymorphe de l’enfant, à savoir que l’enfant peut prendre du plaisir à toutes sortes comportements, voyeurisme,  suçotement.. ce qui est réputé être normal chez lui.

Un certain nombre de ces comportements se maintiennent  chez l’adulte, habituellement ces comportements se regroupent autour de l’amour d’une personne et non d’un accessoire qui peut accompagner l’échange. Dans certaines formes de persistances à l’état adulte, des contraintes à des plaisirs infantiles, peuvent gêner l’individu dans la sexualité avec l’autre.

 

 

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