Anatomie du contexte.
Le réel actuel, c’est une fois de plus des restrictions, qui nous imposent de vivre voire de survivre et beaucoup moins d’exister. Vivre ? Parce qu’une forme de passivité et d’inertie nous sont imposées par ces confinements et ces couvre-feux itératifs, à partir desquels la restriction d’activité et de mouvement entravent l’initiative. La constatation de façon impuissante, par les populations en tant qu’uniques victimes, que l’état social est mis à mal par la survenue de maladies chroniques pour n’évoquer que cette cause. Et ce n’est qu’un début. Quant à la cacophonie qui règne auprès de ceux qui suggèrent et entérinent les décisions dont nombre d’entre elles sont aporétiques, chancelantes, s’exécutent au mépris des populations et engendrent de la méfiance. Une incompréhension de ces mesures jugées excessives, un quotidien bouleversé vis à vis duquel l’adaptation peine à se faire, des messages de peur transmis aux populations, un ‘’vaccin’’ (qui n’en est pas un, mais une thérapie génique prophylactique) dont on ignore tout de ses effets à moyen et long terme, des esquisses de lendemain dont on entrevoie que les sombres contours, sont autant d’éléments qui dégradent la santé mentale, bien plus que l’épidémie n’impacte la santé physique.
L’un des symptômes le plus couramment observé est un délitement progressif de la confiance en soi auprès de la population générale. Sous-tendue par un sentiment «sécure», cette croyance favorise l’adhésion de l’individu, au fait d’être en capacité de s’adapter à une situation jugée complexe par ses incertitudes, ses ambivalences, et ses menaces. C’est cette pulsion de vie qui incite à dépasser les doutes assaillants, dans un environnement fluctuant. Or, nous assistons à une remise en cause de soi, qui plombe dans la répétition du même et/ou dans l’inaction.
Cet ébranlement de soi, ne concerne pas tant seulement les ‘’mis sous cloche’’ à temps plein, mais aussi ceux qui travaillent, éprouvant ainsi le sentiment de ne plus avoir les compétences et l’énergie nécessaires pour accomplir des taches professionnelles. Un ‘’à quoi bon’’ qui revient en boucle autant qu’un ‘’on ne sait où on va’’ . D’autres témoigneront du fait d’être habités par le syndrome de l’imposteur :’’… j’ai un sentiment de dépersonnalisation qui me fait m’interroger sur le comment j’ ai pu accomplir tant de choses… comment j’ai pu obtenir de telles promotions…’’
Le télétravail, ne constitue pas que la voie rapide d’accès à son bureau ou encore la faculté d’aménager ses horaires de travail à sa convenance, il est aussi un mode de fonctionnement qui insularise les personnes. Tous ses usagers le remarquent, une majorité s’en plaint et beaucoup en subissent le contre coup.
L’insécurisation ressentie, ne repose pas tant seulement sur le risque de contagion, ou sur l’incertitude vis à vis de l’avenir, elle se fonde entre autre sur la constatation de l’obsolescence et donc l’inadaptation des institutions qui gèrent l’état social. Au delà de cela, comme le jugeait Camus :’’Mal nommer l’objet, c’est ajouter au malheur de ce monde’’. La plus part des dirigeants, annonçaient en début de crise, que leur pays respectif était en état de guerre. Une guerre contre un ennemi invisible, devant nécessairement justifier du fait, qu’à une situation exceptionnelle soient assorties des mesures exceptionnelles. Dés lors, c’est la démocratie qui, plus à tort, qu’à raison, est prise en otage : pour demeurer en sécurité, il faut renoncer à certaines de nos libertés, à défaut de quoi on s’expose au danger de mort. Curieuses mesures, lorsque la létalité ne dépasse guère 0,025 %, lorsque le pourcentage de ceux qui vont bien, oscille entre 99,5 % et 99 ,8 %.
Peut-on parler de pandémie, lorsque le virus n’atteint guère TOUS les individus ? Non ! Pourtant, partant de cette sur-généralisation, l’assignation à résidence des citoyens peut allègrement se mettre en place. Motif : limiter le risque de propagation mais surtout l’engorgement des hôpitaux qu’on a si longtemps négligé et dont le nombre de lit connaît une réduction fréquente. La chaîne des causalités ne cesse alors d’engendrer des ramifications. La crise sanitaire accroît les injustices, depuis la promiscuité vécue par certaines familles confinées, en passant par l’inégalité face à la protection sociale et celle de l’accès à l’éducation, la discrimination raciale et la violence exercée contre les femmes. En Angleterre notamment, 12% des enfants n’avaient pas d’accès Internet fiable à la maison, 19,1% ne disposaient d’aucun espace de travail et 26,9% ne possédaient pas de bureau.1
Une gestion de la crise qui insécurise de façon paroxystique les populations et leurs font payer un lourd tribut sur le plan humain.
Sur le plan de la santé mentale, le manque de soutien social affecte un large éventail de processus internes de l’organisme, déclenchant des troubles anxieux et dépressifs qui, à leur tour vulnérabilisent le système immunitaire. L’isolement prolongé des personnes et le manque de soutient, produisent une augmentation exacerbée des secrétions de cortisol.2
Des études récentes mesurant le «risque relatif cumulatif» chez les adultes et les adolescents ont montré qu’une exposition à une solitude prolongée, un étayage familial saccadé, une instabilité des relations amoureuses et les violences familiales durant cette période , ont conduit à l’apparition de symptômes dépressifs dont l’intensité augmente progressivement auprès d’un nombre croissant d’individus.
Mieux résister à cette tempête en cultivant un optimisme serein
Apposer le regard sur la partie pleine du verre, savoir composer avec ce que l’on a plutôt que se laisser griser par ses manques, est vital pour la culture d’un optimisme.
Certains considèrent que l’optimisme connaît pour l’heure une carence, par l’attention entièrement dédiée envers les effets de la crise sanitaire notamment sur la santé mentale. D’autres appartenant au monde de l’entreprise, expliqueront cette même carence par l’importance exagérée, octroyée aux phénomènes de burn-out et de dépression dans la sphère professionnelle.
L’idée consiste à inventorier les outils efficaces mis en place dans la sphère professionnelle, pour faire en sorte que les dépressions et les burn-out soient exceptionnels, Apprendre à gérer son stress est indispensable, mettre ces outils en pratique au sein d’un environnement donné est une tout autre pair de manche.
Être dichotomique en disant que la communauté humaine se scinde en deux catégories : les pessimistes d’un côté et les optimistes de l’autre, c’est nier sa complexité en tant qu’elle est une capacité à élaborer des spectres de nuances. L’être humain est bien au delà qu’une unité pensante de façon binaire. C’est un peu comme dans les religions où l’on oppose de façon dualiste, ceux qui font du bien à ceux qui font du mal.
On trouvera toute une littérature faisant l’apologie de l’optimisme, visant à montrer que ce trait de personnalité, favorise une meilleur adaptation tant physique que mentale, donc une meilleur santé et davantage de réussite dans le monde du professionnel etc. Par conséquent, il convient de l’être pour figurer au palmarès des bons élèves, des gens biens. Comme s’il suffisait de décider d’être optimiste pour le devenir, ou encore comme si par mimétisme de ceux qui le sont, on pouvait l’être à son tour. L’optimisme n’est pas performatif ! Penser qu’il lui suffirait d’y croire pour réussir, c’est d’une part vouloir faire obéir au diktat de l’optimisme et du bonheur dans l’intérêt de ceux qui dictent l’injonction et c’est d’autre part, responsabiliser et culpabiliser la personne carencée, en lui insufflant l’idée selon laquelle : tout sujet est l’unique responsable et coupable de son propre malheur. Or, cette idée, ignore les déterminismes environnementaux qui ne sont pas des moindres dans la configuration de l’humain. Cela ne signifie pas que l’individu ne dispose pas d’une certaine liberté d’action, cela ne l’exempt pas non plus d’une responsabilité, mais cela implique davantage, que la liberté d’action s’inscrit dans un environnement donné, c’est à dire selon la nature et les lois qui régissent ce dernier, dans lequel l’individu baigne.
Tout le monde s’accordera à dire, qu’il est indispensable de développer et d’entretenir sa puissance d’agir. Quel répertoire d’attitudes, mettre en place, tenant compte des configurations environnementales, pour satisfaire cette volonté ?
Le désir est aussi fonction du sens avec lequel nous imprégnons les choses. On ne peut forcer les personnes à être optimiste, à y croire, même dans l’entreprise, car cela nécessite un préalable non des moindres. Faut-il encore que les objectifs soient d’abord et avant tout concordants entre ceux qui dirigent et le reste des collaborateurs ? Si la question devait être creusée selon ce tropisme, le débat resterait intarissable !
L’optimisme ne peut trouver d’ancrage qu’en présence d’un sens. Dans le milieu professionnel, ce même optimisme, ne trouve d’adhérence que s’il est partagé dans le cadre d’une collaboration win/win et non qu’il soit fondé sur un contrat léonin.
Croire en un avenir meilleur ? Pas aveuglément !
La crise sanitaire actuelle, fait tous les jours un peu plus perdre espoir à des personnes appartenant à différentes corporations : les cols blancs, les médecins, les comptables…, par manque de perspectives futures, nous en avons exposé les raisons ci-dessus.
Qu’est ce qui permet à un sujet de se rassurer en se disant que demain sera peut être meilleur ?
Imiter un optimiste pour le devenir à son tour, cela revient à singer sans tenir compte de ses propres aspirations. De même que, qu faire preuve de psittacisme en rabâchant inlassablement que demain sera meilleur qu’aujourd’hui, n’est que vaine entreprise, tant que rien n’est élaboré en faveur d’une amélioration des choses.
Améliorer des lendemains, suppose une volonté en tant que désir sincère et un courage. L’acte de dépassement de soi ne s’opère que face à l’épreuve à du vide. Faut-il être conscient que les ressources existent bien en soi et que leur accès est rendu possible. Cela témoigne d’une forme de générosité envers soi même. Faire appel à son répertoire de ressources pour sécuriser son territoire intérieur suscitera l’envie d’en découvrir d’autres qui soient également extérieurs à soi. La créativité en est la voie royale. Se sentir apaisé et œuvrer en faveur de ce qui dépend de soi, permet de bâtir les structures pérennes de demain en investissant profondément le présent. Ceci est vrai sur le plan individuel autant que sur le plan collectif.
Par conséquent, cette démarche conduit à redéfinir le bien. Pour ce faire, convoquons Spinoza : le bien nous dit-il est l’utile. S’interroger sur l’utile revient à hiérarchiser l’importance des choses qui rythment et bâtissent notre vie. Repenser l’utile, favorise une sécrétion de douceur au sein de notre existence même.
Par voie de causalité, se motiver consiste à se recentrer sur les objectifs qui font sens. Il en est de même dans la sphère de l’entreprise, motiver son équipe consiste à la recentrer vers des cibles précises, à condition qu’elles aient été clairement définies pour chacun. Adhérer à un objectif, c’est trouver ce qui fait sens pour soi. Avant de motiver une équipe, faut il encore s’assurer que le sens soit bien présent pour chacun et non juste auprès d’une poignée d’individus.
Dés lors, l’échec ne laisse plus de goût amer, ni de frustration face à laquelle le renoncement constitue la voie de la sagesse. Bien au contraire, l’échec est exploité comme un Kairos : une opportunité de rendez-vous avec la compréhension et l’apprentissage pour davantage de performance. C’est au travers cette représentation des choses, qu’est produit le carburant nécessaire à sa propre réalisation.
Relativiser ce qui ne va pas dans le sens voulu, consiste à atténuer les distorsions cognitives, à orienter son esprit vers le côté plein du verre et à apprécier son lot. Ainsi substituer une représentation teintée négativement, à une représentation plus allègre, permet sur le plan neurochimique non seulement de réduire significativement la charge émotionnelle négative, mais aussi de doper le corps.
C’est en même temps, configurer une vision mentale qui entrevoit les possibles, ceux qui font tendre vers des aspirations et entretiennent un enthousiasme d’en faire encore et encore . Telle est me semble t-il la voie d’accès à la joie.
Le monde de l’entreprise a tendance à abhorrer les émotions et les sentiments négatifs, Comme s’ils étaient une entrave radicale au bon fonctionnement humain, en l’occurrence à la productivité. Les émotions quelles qu’elles soient, sont une scénarisation sur le théâtre du corps des représentations que nous nous faisons d’une personne, d’une situation… Se livrer à une chasse phobique des émotions négatives, c’est empêcher l’autre d’être lui même, c’est vouloir nier une part de l’autre.
Éprouver des émotions est bien naturel et nous devons les laisser s’exprimer, à condition de les baliser. Être optimiste, n’empêche pas d’éprouver de la tristesse, ou de la colère…., c’est surtout se relever et poursuivre sa voie, malgré cette négativité ressentie. Les émotions nous permettent de comprendre ce à quoi nous réagissons. Laissons les s’exprimer et apprenons à les canaliser pour tendre progressivement vers le principe d’homéostasie.
1Child mental health in England before and during the COVID-19 lockdown – The Lancet
2 Hawkley, L.C.et al, 2009.