Au cours de 30 dernières années on a tenté d’élucider le lien entre la sérotonine et la dépression. Il a été ouvert dix études et méta-analyses tentant par différentes procédés d’éluder le lien entre le taux réduit de concentration en sérotonine dans le sang avec la dépression. Aucune de ces recherches n’a pu apporter de preuves suffisamment poignantes pour établir un de lien de corrélation entre la carence sérotonine et la dépression. C’est ce que révèle Joanna Moncrief professeur de psychiatrie à l’University College London dans une étude (1) parue le 20 juillet 2022. Néanmoins, ce n’est pas la première étude du genre. En 2014, on s’interrogeait sur le lien entre l’antidépresseur et la concentration de sérotonine avec l’effet placebo (2)
Les recherches sur les causes biologiques de la dépression se poursuivent. Néanmoins, une interprétation autre sur ses causes, peut être envisagée. Ce pourrait être les événements de l’existence en générale notamment : les difficultés socio-économiques observées au cours des différentes crises économiques et financières ou encore des difficultés personnelles, telles que : la santé, la famille… qui vont intensifier certaines vulnérabilités et feront que le sujet traverse un épisode dépressif normal ou majeur. Cela n’empêche que l’impact psychologique puisse s’étendre sur l’ensemble du soma, notamment par l’expression paroxystique de passions : peur, anxiété, tristesse, colère… qui par l’entremise de certains neurotransmetteurs tels que le cortisol, les catécholamines, sécrétés à concentration élevée, comporteraient des effets délétères sur les organes du corps et les systèmes qui le régissent.
La vue réductrice consistant à n’observer la dépression que sous l’angle d’une mécanique neurochimique défaillante, écarte d’emblée tous facteurs environnementaux. Auquel cas, la voie idoine d’une application thérapeutique reste de toute évidence pharmacologique. En revanche, si l’on considère les facteurs environnementaux comme une des causes non des moindres, voire la cause principale de la dépression, la stratégie thérapeutique devra alors davantage être axée sur un accompagnement psychologique de la personne, l’aidant à une meilleur adaptation aux méandres de l’existence.
Un grand nombre des usagers de l’antidépresseur affirment hautement son efficacité. Mais au regard de cette découverte saillante, cela signifie qu’il est à peine plus efficace qu’un placebo lors d’essais contrôlés randomisés.(3)
Cela pourrait se justifier, par l’amplification d’effets placebo sur ceux qui croient à l’impact de l’antidépresseur, ou encore se pourrait-il que ce même effet placebo produise un émoussement émotionnel.
Un élément supplémentaire est à considérer lequel est fondé sur la performance des essais cliniques améliorés au fil des années. Ce qui laisse à penser que leur effet placebo est partiellement attribuable à une efficience du marketing. Plus la panacée de l’antidépresseur est adulée dans les médias et plus il gagne en efficacité. Les croyances ont un effet de contagiosité. Elles sont fondées sur un acte de foi, lequel se passe avec une insouciance infantile de démonstration. Les consommateurs d’antidépresseurs agissent en somnambule face à la prescription pensant profondément, qu’ils les sortiront de leur mal-être. Cela fonctionne dans un certains nombre de cas, sauf que les effets indésirables à la longue peuvent être nombreux et invalidants. L’effet indésirable, n’est autre qu’un trouble qu’il faut aussi soigner.
Que faut-il en conclure ? Voici ce que révèle une étude (5) parue en 2014 : »Les antidépresseurs sont censés agir en corrigeant un déséquilibre chimique, en particulier un manque de sérotonine dans le cerveau. En effet, leur efficacité supposée est la principale preuve de la théorie du déséquilibre chimique. Mais les analyses des données publiées et des données non publiées qui ont été cachées par les sociétés pharmaceutiques révèlent que la plupart (sinon la totalité) des avantages sont dus à l’effet placebo. Certains antidépresseurs augmentent les niveaux de sérotonine, certains les diminuent et certains n’ont aucun effet sur la sérotonine. Néanmoins, ils présentent tous le même bénéfice thérapeutique. Même la petite différence statistique entre les antidépresseurs et les placebos peut être un effet placebo accru, en raison du fait que la plupart des patients et des médecins des essais cliniques ont réussi à briser l’aveugle. La théorie de la sérotonine est aussi proche que n’importe quelle théorie de l’histoire des sciences d’avoir été démentie. Au lieu de guérir la dépression, les antidépresseurs populaires peuvent induire une vulnérabilité biologique rendant les gens plus susceptibles de devenir déprimés à l’avenir. »
Il se pourrait qu’avec le temps la recherche en la matière s’améliore. En attendant, un certain nombre de patients dépressifs, addicts du petit cachet d’AD (antidépresseur), se retrouvent désarçonner, notamment ceux qui malgré parfois le peu d’amélioration constatée, continue de l’absorber comme un acte répondant à rituel sédatant.
(1) The serotonin theory of depression: a systematic umbrella review of the evidence
(2) The emperor’s new drugs: medication and placebo in the treatment of depression
(3) Placebo Effect in the Treatment of Depression and Anxiety
(4) Considering the methodological limitations in the evidence base of antidepressants for depression: a reanalysis of a network meta-analysis
(5) Placebo Effect in the Treatment of Depression and Anxiety