L’expérience de l’effroi, peut à tout jamais estampiller la mémoire de son sceau, occasionnant des effets invalidants.
L’OMS estimait en 2013, à environ 3.6% des personnes dans le monde, affectées par un syndrome de stress post traumatique. Ce dernier est loin d’être en rapport avec l’époque moderne.
Les historiens de la médecine ont répertorié de nombreux témoignages de maladies qui entreraient aujourd’hui dans la catégorie des syndromes de stress post-traumatiques. Depuis des temps immémoriaux, il a été rapporté par Hérodote, qu’un soldat athénien avait été frappé de cécité, après avoir été témoin de la bataille de Marathon en 490 ap JC. Les descriptions des combattants de la guerre de Sécession avaient développé ce que les médecins appelaient à l’époque le « soldiers heart » l’ancêtre du syndrome de stress post traumatique.
Mais revenons à des considérations neurobiologiques, à partir d’une expérience élaborée sur les souris, il a pu être observé que la formation d’un souvenir traumatique mêle deux zones corticales : l’hippocampe obéissant à la fonction d’encodage de la mémoire et l’amygdale activant les fonctions de vigilance face à la crainte de la survenue d’un événement.
Il apparaît en toute hypothèse, que la formation mémorielle de la peur, s’effectue :
– d’une part à partir d’une stimulation intensives des connexions neuronales entre les deux zones corticales citées.
A partir d’une expérience de l’effroi, la norépinéphrine, un des neurotransmetteurs sécrété par des état de stress, va stimuler une certaine population de neurones inhibiteurs dans l’amygdale pour générer un schéma répétitif de décharges électriques. Cette intensité de l’activité électrique modifie la fréquence d’oscillation des ondes cérébrales dans l’amygdale d’un état de repos à un état d’éveil contribuant la formation de souvenirs de peur.(1)
-d’autre part, à partir d’un apprentissage des expériences traumatiques, ce afin de prévenir toute exposition à la menace, dans l’avenir.
Elle est par conséquent hautement adaptative. Cela signifie que si qu’elle permet au corps une sauvegarde de lui-même, c’est au moyen de sa capacité à puiser dans sa bibliothèque des souvenirs.
Cependant, les expériences traumatiques peuvent rendre l’amygdale dysfonctionnelle occasionnant une amplification des perceptions de la menace. La mémoire traumatique assiège l’espace psychique en intensifiant différents symptômes tels que : la survenue de cauchemar en série, le tournage en boucle de souvenirs traumatique, l’évitement de situation pouvant déclencher les effets du trauma, des sur-réactions, des états d’agitation anxieux et une humeur dépressive.
Dit autrement, le mécanisme neuronal de la peur implique un apprentissage suscitant un comportement d’anticipation ayant valeur de survie, face à une menace dont la probabilité d’aboutissement n’est pas avérée, ou encore tendant vers une valeur insignifiante.(2)
Prenons l’exemple d’un sujet s’étant fait renverser par une voiture. Bien longtemps après avoir guéri de ses blessures, il risquerait de demeurer plus en alerte que d’ordinaire, à l’occasion de la traversée d’une chaussée et en particulier celle en rapport avec le lieu de l’accident. Le cerveau associera le lieu de l’événement à un vécu désagréable. Se pourrait-il même que la mémoire associative suscite une réaction disproportionnée de l’amygdale, dès lors que le sujet et plus précisément sa mémoire entrera en collision avec l’un de ces détails aussi infimes soient-il rappelant ceux de l’accident. Rappelons qu’une amygdale dysfonctionnelle, est soit en hyper excitation, et c’est en l’occurrence le cas, soit en hypo-excitation.
En effet, lors d’un événement en général et d’un trauma en particulier, le cerveau va cartographier l’ensemble des éléments sensoriels stimulés lors de l’accident, tels que : le paysage, le mouvement, l’odeur éventuelle, le bruit environnant etc. L’ensemble de ces éléments stockés dans la mémoire serviront de base comparative à une nouvelle cartographie élaborée dans le présent et pouvant se transformer en stimulus éventuel, générant une anxiété ou un malaise au cas où la mémoire associative percevrait un ou plusieurs détails semblables à ceux de la situation traumatique. Puisque la mémoire est à l’image de la neuroplasticité, c’est à dire adaptative. En l’occurrence, pour le cas d’un traumatisme, elle vise à déclencher une anticipation de la menace via différents zones du cortex. Elle pourrait toujours par ses fonctions adaptatives, passer par des apprentissages visant à stimuler le circuit de la récompense pour envisager une résilience face à un traumatisme. Ce pourrait être un champ de recherche particulièrement prometteur.
- https://news.tulane.edu/pr/study-examines-why-memory-fear-seared-our-brains
- https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24290204/