Le peuple juif incarne la mémoire, celle des peuples monothéistes et celle du système spatio-temporel dans lequel nous vivons.
L’événement ‘E’ que les sages d’Israël appellent à se souvenir, ne se réduit pas au simple fait d’être porté sur un calendrier, mais va bien au-delà . Ils invitent à ressentir les circonstances qui l’ont conduit jusqu’à sa naissance. La fonction de mémorisation dans le judaïsme, est loin d’être une fonction inerte, elle est considérée de façon rigoureuse, appelant à ses constituants dans le système nerveux.
La mémoire juive se veut dynamique et de longue durée. Les sages d’Israël préconisent son entretien, toujours dans leur volonté inépuisable de transmission. Le texte biblique fait usage d’un binôme Zakhor/Chamor, qu’il convient d’examiner. Voyons de quoi il en ressort ?
Le vocable hébraïque Zakhor (Souviens toi) traduit l’ordre de se souvenir qui implique le préalable de se mémoriser. La mémoire, nous le savons bien, faillit, à savoir, que l’événement devant être retenu peut être rangé dans un coin du cerveau, sans ne plus jamais réapparaître ou peut être de façon sporadique.
Physiologiquement, la mémorisation en l’absence de charge émotionnelle, ou d’apprentissage, ne fait appel qu’à la mémoire à court terme, donc susceptible de n’être retenu qu’un laps de temps extrêmement réduit. Dans le cas d’un apprentissage, on favorise la mémorisation par l’expérience, le vécu.
Les sages d’Israël bien que n’ayant pas effectué de parallèle avec l’univers cellulaire, ont perçu le phénomène par l’observation du comportement et du langage.
Tout effort de mémorisation, si on le veut concluant se doit d’être stimulé et répété afin de faire appel à la mémoire à long terme. Le principe de la mémoire à long terme, permet la répétition de l’expérience agréable et l’évitement ou la fuite de l’expérience désagréable. Elle va aussi et surtout, permettre d’associer l’élément spatio-temporel de l’expérience mémorisée, aux voies synaptiques. Cela va provoquer l’apparition de toutes sortes de réflexes, dont des réflexes affectifs.
Dans leur détermination inépuisable de transmission de la loi, les sages d’Israël ont demandé de coupler la mémorisation à la fonction de réalisation, c’est ce qu’ils entendent par l’injonction d’observer : Chamor. Observer n’est en rien statique et va dans son interprétation, au-delà de son étymologie hébraïque qui, au passage, n’exempte pas de l’action de compréhension. Le passage à l’acte, l’engagement de l’être (avec son corps, son esprit et son âme) dans l’action, fait qu’il réalise tout en se réalisant dans cette action. L’individu se visualise, non dans son imaginaire, mais dans la scénarisation de son être à travers l’action.
Il revit en quelque sorte l’évènement en référence à ce souvenir au moyen de la symbolique. Rappelons que nous n’avons de possibilité de revivre un événement du passé que par un ressenti en faisant appel à la mémoire qui non seulement enregistre l’événement mais également l’ensemble des éléments environnementaux et sous-jacents.
En l’absence de vécu, seul le symbole peut nous en faire percevoir la teneur. Seule alors, la fonction d’apprentissage nous aide à comprendre et à retenir le symbole.
Ce principe acquis, il suffit de l’appliquer, se souvenir et réaliser. Réaliser pour entretenir ce souvenir et réitérer l’expérience qui pourrait se résorber en l’absence de manque de vécu.
De quelle façon réaliser ? Dans les moindres détails, chaque symbole allant pointé son origine dans le souvenir de l’évènement, est instrumentalisé de façon précise et qui plus est, ordonnée.
Prenons l’exemple de la fête de Pessah (Pâcques), ou encore Chabbat. Deux exemples pour lesquels le texte biblique fait appel à ce fameux binôme pour observer leurs lois : Chamor/ Zakhor, et réciproquement Zakhor/Chamor.
Il faut se souvenir, et observer (le réaliser) dit le texte. Comment ? Intervient alors ensuite la liste des commandements sous jacents à ces premiers. Seule La réalisation dans le détail de l’application du commandement premier, fera que l’être pourra générée une charge émotionnelle positive, au moyen de leurs implications matérielles, cela peut être notamment en attribuant un aspect festif, joyeux (émotion positive). Vivre la fête, par la dégustation de mets destinés pour l’occasion, par l’explication des symboles, par la narration de l’histoire, par la pratique des lois, et faire en sorte d’être exempté des impératifs de ce monde durant le jour J. L’action est orientée vers ses versants spirituels et ne connait du monde matériel, que quelques jouissances sensorielles. En réitérant l’expérience de la pratique, on stimule le besoin, celui de réaliser certains buts spirituels.
Physiologiquement, le besoin se définit comme la quantité d’énergie ou d’information nécessaire au maintien de la structure nerveuse, soit innée soit acquise (Henri Laborit)
Les sages d’Israël avaient peut être perçu le phénomène sous l’angle physiologique sans en tout cas jamais l’avoir énoncé. Merci à la science d’avoir su le corroborer grâce à ses observations. Armand Shneor