Neurobiologie de l’impulsivité et addiction aux substances

L’impulsivité est une construction multidimensionnelle, incorporant une variété de comportements.

Elle est souvent assimilée à des mécanismes de contrôle ascendants auxquels leurs sont substituées des réponses spontanées non réfléchies, automatiques dirons-nous, axées sur la récompense, associées à un contrôle cognitif réduit à son minimum et dont les réactions peuvent ne pas être appropriées, voire désinhibées(1,2).

L’impulsivité est envisagée sous quatre axes : le manque de réflexion préalable ou encore l’absence de préméditation, le manque de persévérance,   la recherche de sensations, le caractère pressant ou l’urgence (3,4).

L’urgence s’inscrit dans un premier versant, dans lequel le sujet impulsif agit imprudemment pour en obtenir un effet extrêmement positif et un second versant qui se situe toujours dans une configuration imprudente et risquée, pour en obtenir un effet négatif voir destructeur (5).

Des lésions cérébrales et nombre de maladies mentales peuvent prédisposer un sujet à des dysfonctionnements du dispositif de contrôle inhibiteur (MCI), produisant à la clé des comportements impulsifs (6,7).

Les premières consommation drogues à usage récréatif, peuvent déclencher un comportement impulsif (6)

Indépendamment de la lucidité qu’un individu porte sur les méfaits directement liés à la consommation de stupéfiants (notamment leurs effets sur la santé, les finances et les relations interpersonnelles), la consommation régulière de drogues et l’échec répété de diminution voire de tentatives d’interruption, peut également être médié par un mécanisme de contrôle inhibiteur dysfonctionnel ne faisant que renforcer l’immédiateté d’un désir irrépressible d’assouvissement.

De nombreux modèles ont été étudiés pour élucider la relation entre le comportement impulsif à la prévalence d’un trouble en relation avec l’usage de stupéfiants, englobant des mécanismes neurobiologiques inhérent à cette cause. L’une des explications penche sur le fait que les effets secondaires de certaines droguent entraîneraient des changements neurobiologiques et structurels affectant la maîtrise de soi (8).

Une autre hypothèse suggère que la maîtrise de soi étant préalablement défaillante à la prise de drogues, constitue un marqueur de vulnérabilité pour vis à vis du tempérament impulsif (9).

L’axe dopaminergique Daergique(10) et glutamatergique (11) impliqués dans l’apprentissage liés à la récompense, ont également fait l’objet d’études cliniques pour élucider la relation complexe entre l’initiation à la consommation de stupéfiants, la perpétuation du comportement, la dépendance et la rechute avec le comportement impulsif (9).

Une définition courante de l’impulsivité est l’absence d’inhibition comportementale conduisant à la tendance à agir spontanément sans réfléchir (12).

L’impulsivité a été considérée comme un « échec du processus inhibiteur » 32, car elle génère des implications dans les circuits frontostriataux conduisant au dysfonctionnement du contrôle cognitif descendant (13).

Une  autre caractéristique de l’impulsif, concerne ses prises de décisions, qui dans bien des cas s’exécutent dans la précipitation, sans réflexion préalable  et qui le conduisent à des actions impropres, dont les conséquences peuvent être préjudiciables. L’impulsif confronté à une charge émotionnelle forte, ne s’appartient plus et se montre incapable de raisonner.

La décision impulsive se contentera d’une récompense négligeable, à court terme, plutôt qu’une récompense plus significative à plus long terme(12).

L’impulsivité est également associée à un déficit attentionnel (12), plongeant le sujet dans une incapacité d’observer des instructions(14). Des découvertes récentes suggèrent que les traits de personnalité, la  préférence à l’actualisation et les inhibitions de la réponse, constituent les trois champs de l’impulsivité conceptuellement connectés (15).

– L’urgence est liée à la tendance à réagir de manière irrationnelle aux émotions négatives entraînant des conséquences compromettantes a été associée à une stimulation excessive de l’activité du cortex préfrontal latéral (PFC) entraînant une défaillance de l’autorégulation (notamment par l’abus de substances) (16).

– Le manque de préméditation a été associé à une réduction du volume de la matière grise dans l’insula et le putamen. L’insula est impliquée dans les sentiments d’empathie, il se pourrait donc que la réduction du volume de l’insula entraîne des réponses moins empathiques lors  d’actes agressifs.

Le putamen porte atteinte à l’efficacité des processus de prise de décision (17 ). Le manque de persévérance ou le manque de conscience est lié à une altération de la fonction du cortex cingulaire antérieur (ACC) et des cortex ventrolatéral gauche et préfrontal antérieur gauche, liés à des comportements à risque (18).

– la recherche de sensation a été associée à l’activation de régions liées à la motivation, à l’excitation et au renforcement telles que le cortex orbitofrontal médial postérieur et à l’insula (19).

Un neurotransmetteur non des moindres, en l’occurrence la dopamine joue un rôle prépondérant. Une prédisposition de base aux comportements addictifs et impulsifs est centrée sur un ensemble de gènes qui favorisent les sentiments de bien-être via la libération de dopamine (20) des neurones NAcc par le biais d’interactions de neurotransmetteurs dans le système mésolimbique 

La stimulation du système mésolimbique déclenche un effet renforçateur.

L’environnement apporte son lot de contribution à l’impulsivité (21). Une exposition prénatale aux drogues ou à l’alcool, des conditions socio-économiques précaires, et de la violence, prédisposent l’enfant à naitre à l’impulsivité et à des addictions aux substances (22,23). Les facteurs épigénétiques contribuent également à l’impulsivité et à la dépendance. Dans une étude longitudinale, Wang et al . ont constaté que l’impulsivité se mettait en en place dans un schéma liant la désorganisation familiale à la consommation d’alcool subséquente (24).

Enfin, d’autres comorbidités telles que le TDAH, les troubles des conduites, le trouble oppositionnel déviant et d’autres difficultés comportementales chez l’enfant peuvent constituer des facteurs de risque de l’impulsivité(25). La recherche de sensations qui peut être l’une des caractéristiques de l’impulsif, ferait que son facteur de risque d’aller vers une addiction serait élevé. (26)

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