Mythomanie et réalités parallèles

Petit poisson qui se prend pour un requin

Gilles 35 ans, vit avec Eve depuis deux ans en région parisienne. Ça ne va très fort entre eux en ce moment. Eve lui reproche d’inventer des histoires et de lui mentir souvent. Au moment le couple se constitue gilles prétend être consultant. Quelques mois plus tard il est licencié et dit à Eve, qu’il vient de s’associer avec quelqu’un et que cette nouvelle collaboration augure de perspectives prometteuses. Gilles empreinte de l’argent auprès de ses amis pour sa nouvelle entreprise.

Quelques mois plus tard, gilles dit à Eve qu’il avait un diplôme d’infirmier et qu’il exercerait pour l’instant dans un cabinet. Ceci est évidemment faux. Quelques semaines passent mais la situation financière de gilles décline davantage et sollicite l’aide financière de sa belle-famille, qui acquiesce de mettre la main à la poche.

Gilles possède un réservoir des récits anecdotiques imaginaires à raconter sur son quotidien d’infirmier. Le temps que la somme nouvellement emprunte soit engloutie, gilles se retrouve de nouveau pris à la gorge. Après une dispute houleuse avec Eve, celle-ci s’aperçoit que gilles n’a jamais travaillé depuis qu’ils se connaissent. Mais gilles nie en bloc et voilà que pour se trouver une porte de sortie, il remet la partie en répondant à Eve, qu’une opportunité se présente à lui en hollande et qu’il devra y aller s’y installer. Eve qui après avoir investiguer sur le parcours de son compagnon, découvre que ses mensonges sont pathologiques et sur les recommandations de son médecin, elle demande à son compagnon d’aller plutôt consulter que de s’expatrier. Mais ne manquant pas d’imagination, gilles argue que son projet d’expatriation est prioritaire, car il croit fermement à ses mythes.

C’est sur ce type d’exemple, que se fonde l’existence du mythomane. A la manière de gilles le mythomane est un jour médecin a paris, le lendemain pilote a san Diego, le surlendemain archéologue à Kheops son imagination est fertile, il émane de lui un flot d’idées de toutes sortes qui s’échappent dans tous les sens, il est plein d’entrain, c’est d’ailleurs le principe de la manie. Alors que le sujet « sain » sait qu’il ment et il le fait dans un but détermine, le mythomane a une propension compulsive au mensonge, il ment sans l’avoir décidé et même presque en dehors de lui. Ernst Dupré, inventeur en 1905 de ce terme pathologique, a montré que cette activité mythique est variable selon les âges, elle est particulièrement développée chez l’enfant et dans l’enfance de façon générale. Il a rapporté de nombreuses observations d’enfants qui soit spontanément, soit sous l’influence de leurs parents, ont émis des témoignages inexacts mettant en cause des personnes allant jusqu’à les faire accuser voir les faire condamner.
Le mythomane sombre en réalité dans un profond mal être, qui amorce ses affabulations à partir d’une histoire inventée et à laquelle il finit par adhérer sincèrement. Le récit rapporte par le mythomane est logique et plausible, autrement dit sa construction intellectuelle se tient, c’est pourquoi il est difficile de l’épingler sur la base de l’argumentation logique, car il a réponse à tout. Le tout est conditionne par sa capacite à produire des récits mythiques.
La mythomanie est souvent accompagnée de vanités comme y a insisté Dupré, dont les mobiles pathologiques sont plus ou moins inconscients et guident la conduite du sujet. Il existe également outre la mythomanie vaniteuse, la mythomanie perverse qui peut aboutir à des délires et a des variables de psychoses dans certains cas. Dupré va au-delà en mentionnant que la tendance mythomaniaque constitue un terrain propice aux manifestations hystériques.
Il est difficile d’évaluer le degré de lucidité du mythomane, sachant que tout sujet peut avoir des phantasmes mégalomaniaques visant à protéger son propre narcissisme, son amour propre des épreuves douloureuses de la réalité. Dès qu’un échec parvient, l’humeur du sujet est altérée, son narcissisme éprouve et un ou plusieurs mécanismes de défense contre ses attaques de la réalité se mettent en action. L’imagination incarne cette fabuleuse voie qui conduit le sujet dans les contrées les plus abyssales de l’esprit. Elle permet l’évasion grâce à des images compensatrices des épisodes de la dure réalité, ce peut être en effet des scenarios mégalos qui vont ensuite occasionner des récits mythiques ou des affabulations mythomanes.
La mythomanie est une pathologie de l’amour de soi. Le pire pour un mythomane est d’être place face à son mensonge, il doit redoubler d’imagination pour ne pas passer pour ce qu’il refuse d’être, à défaut de quoi, il connaitra la fuite. L’exil mental et/ou géographique est la seule alternative qu’il connaisse parce qu’il lui procure la possibilité de bâtir pour lui et uniquement pour lui une affabulation supplémentaire. C’est bien de lui face à lui-même et non face aux autres. Il va en revanche utiliser l’autre pour exister en tant qu’autre, pourquoi ? Simplement parce qu’a ses propres yeux il n’existe pas, et il n’existe pas car il ne sait pas exister, c’est-à -dire qu’il ne sait pas être dans l’instant. Pour être dans l’instant, l’autre lui est indispensable. C’est comme si l’autre devait lui donner naissance. Or, s’il n’est pas ses propres yeux comment peut-il s’aimer ? Une fois de plus, il va se servir de l’image qu’il se fait de l’autre et qu’il affectionne et se l’approprier, en faire son imago. C’est ensuite celle-ci qu’il va aimer et non lui-même.

Le mythomane ne connait que l’image. Ernst Dupré avait un patient atteint d’un délire d’invention, qui affirmait à l’époque avoir découvert le traitement du cancer, de l’épilepsie l’attitude du patient était frappante en ce sens, qu’il affirmait d’un air condescendant ses découvertes et prédisait aux jeunes médecins du service un avenir radieux. Ce délire s’accompagner d’une tendance à se décorer et le délire le conduisait finalement à affirmer qu’il était devenu maréchal de France. Son délire était également assorti d’un délire de filiation. Le malade se croyait de descendance illustre, possesseur de nombreux châteaux. En réalité ce patient était un fils naturel et au cours de ses nombreuses conversations une phrase stéréotypée revenait presque tout le temps : « la mienne est propre, la mienne est propre ». En fait la mienne désignait sa mère et faisait allusion à son humiliation d’être un fils naturel, avec tout un délire de compensation.

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